Audio-visual Production and Public History

Production Audio-Visuelle et Histoire Publique | Audiovisuelle Produktion und Public History

 

Abstract: One reason why public history courses are becoming increasingly popular is their focus on production. If historians have studied films as sources or even narratives of the past, they are very often very critical and highlight inaccuracy or mythical aspects.[1] Very few historians actually produce (documentary) films.[2] In this article, I argue that producing documentary films provides students – and historians more broadly – with skills to engage and communicate with different publics. To support this argument, I reflect on the course that I have been teaching this semester as well as my past experience of producing Theo’s Choice, a documentary film on the history of French education in Louisiana.[3]
DOI: dx.doi.org/10.1515/phw-2019-13822.
Languages: Français, English, Deutsch


Si les cours et programmes d’histoire publique sont de plus en nombreux, c’est en partie grâce à leurs productions. Si les historiens étudient les films comme sources ou discours historiques, ils se bornent souvent à y relever les erreurs et falsifications.[1] Très peu d’historiens produisent des films documentaires.[2] Dans cet article, j’explique que la production de films documentaires apporte aux étudiants de nombreuses compétences nécessaires à la pratique de l’histoire publique. Je m’inspire du cours que j’enseigne ce semestre ainsi que mon expérience de coproducteur du Choix de Théo, un film documentaire sur l’histoire de l’éducation en français en Louisiane.[3]

Manque de compétences

Démontré par de récentes études sur les usages du passé, les productions audio-visuelles sont un des principaux modes de consommation publique d’histoire.[4] Si les films sont toujours très populaires, le nombre de documentaires (présentant des faits et personnages réels) augmente régulièrement.[5] Le succès des festivals du film documentaire – tel le Festival Dei Popoli à Florence, Italie – démontre le potentiel de communication publique de ce type de production.[6] Toutefois, très peu d’historiens participent à leur production, et quand ils le font, c’est souvent comme expert interrogé sur des questions spécifiques. Ken Burns, producteur de film documentaire, est ainsi connu pour ses critiques envers la capacité des historiens à interpréter le passé pour le grand public. Burns ne fait souvent appel aux historiens que pour fournir des éléments de contexte et d’authenticité.[7] En toute franchise, Burns n’a pas complètement tort, et les historiens – qui souvent manquent de compétences audio-visuelles – sont partiellement responsables. Apprendre à faire un documentaire aide les étudiants – et les historiens au sens large comme par exemple en France les documentaires de l’historien public Maxime Patte – à communiquer l’histoire au grand public.[8]

Pratiques d’Apprentissage

Comme la plupart des cours d’histoire publique, apprendre à réaliser un documentaire s’appuie à la fois sur la théorie et la pratique. Une des tâches les plus difficiles pour les étudiants est de se détacher de l’écriture traditionnelle de l’histoire et de construire des interprétations audio-visuelles. Ils doivent limiter l’usage de l’écrit et de la voix-off afin de se concentrer sur le visuel et le paysage sonore. En outre, les étudiants doivent produire un documentaire pour le grand public qui sera projeté dans une salle de cinéma de la ville. Comme tous travaux d’histoire, les étudiants utilisent des sources primaires, mais contrairement aux recherches plus traditionnelles, les sources écrites et les notes de bas-de-page ne sont pas adaptées. Ils doivent donc adopter une approche différente et utiliser des entretiens, des photographies, des films d’archives ou des objets. Les films documentaires sont ainsi parmi les projets d’histoire publique les plus riches et complexes.

Un autre défi pour les étudiants est de considérer les sons et musiques comme faisant partie du discours historique. D’une part les sons et les musiques peuvent être de riches sources primaires que les historiens étudient, mais également servir à enrichir l’interprétation du passé à des moments clés du documentaire, reliant des scènes, ou plus généralement en contribuant à l’aspect émotif de la production. Enfin, l’écriture d’un scénario diffère grandement de l’écriture traditionnelle de l’histoire, mettant en avant des histoires singulières, des rythmes de séquences variés, et apportant un aspect artistique à la production historique. Un scénario ne décrit pas le passé, il doit lui donner vie.

D’étudiants à acteurs de l’histoire publique

Aux États-Unis, l’enseignement de l’histoire publique se concentre énormément sur les compétences et les pratiques. Enseigner la production de documentaires historiques appartient à cette approche pragmatique en encourageant le travail d’équipe et la collaboration. Regroupés en équipes de 3 ou 4 – comprenant un producteur, un archiviste, et un monteur – les étudiants collaborent tous à la production du documentaire. La collaboration est aussi interdisciplinaire, incluant des collègues des départements de communication, de journalisme, ou de production artistique afin de former les étudiants aux pratiques d’enregistrement, de montage, et de création numérique pour la plate-forme finale.

En effet, bien que les films documentaires soient des outils privilégiés de communication, l’interaction avec le public est souvent limitée. J’ai donc demandé à mes étudiants de produire des web-documentaires ou documentaires interactifs. Ce type de documentaire utilise des outils numériques pour mieux incorporer les choix des utilisateurs dans la compréhension, non linéaire, du passé, et peut même abouter à des projets de recherche de doctorat.[9] Les utilisateurs peuvent accéder à des sources supplémentaires, peuvent choisir des chapitres et sujets dans des ordres différents, et interagir avec certains matériaux. Les web-documentaires promeuvent ainsi différentes interprétations des événements ou des sources historiques. Clouds over Cuba et The Orange Story sont deux très bons exemples de web-documentaires qui permettent à leurs utilisateurs d’interagir avec les documents. Mes étudiants utilisent la plate-forme gratuite Eko Studio pour créer les versions numériques de leurs documentaires historiques. A la fin du semestre, les étudiants ont non seulement acquis des compétences audio-visuelles utiles à la pratique de l’histoire publique, mais ils sont également les fiers producteurs de documentaires qui leur serviront pour de futurs projets et candidatures en histoire publique.

_____________________

 Lectures supplémentaires

  • Gilden Seavey, Nina. “Film and Media Producers: Taking History off the Page and Putting It on the Screen.” In Public History: Essays from the Field, edited by Jim Gardner and Peter LaPaglia, 117-127. Malabar: Krieger Publishing, 2006.
  • Zemon Davis, Natalie. “Movie or Monograph? A Historian/Filmmaker’s Perspective.” The Public Historian25, no. 3 (2003): 45-48.

 Resources sur le web

_____________________
[1] Mark Carnes, ed., Past Imperfect: History According to the Movies (New York: Henry Holt and Company, 1995).
[2] Les films documentaires présentent des faits et personnages réels.
[3] https://history.colostate.edu/author/tcauvin/ (consulté le 15 avril 2019).
[4] Par exemple, Margaret Conrad, Jocelyn Létourneau, and David Northrup, “Canadians and Their Pasts: An Exploration in Historical Consciousness,” The Public Historian 31, no. 1 (Winter 2009): 15-34, http://www.histoirequebec.chaire.ulaval.ca/wp-content/uploads/2012/10/Canadians-and-their-Pasts.pdf (consulté le 15 avril 2019).
[5] Anthony Kaufman, “Documentary Sales Are Surging, But What’s Driving the Competition?” IndieWire, April 18, 2017, https://www.indiewire.com/2017/04/documentaries-sales-netflix-amazon-hulu-bubble-1201806552/ (consulté le 15 avril 2019).
[6] Website du Festival dei Popoli, Florence: http://www.festivaldeipopoli.org (consulté le 15 avril 2019).
[7] Colleen Flaherty, “Historians MIA,” Inside Higher Education, January 9, 2018, https://www.insidehighered.com/news/2018/01/09/professors-debate-role-historian-or-lack-thereof-ken-burns-and-lynn-novicks-vietnam (consulté le 15 avril 2019).
[8] Maxime Patte, Un Temps d’Avance, https://www.youtube.com/channel/UCAlu7q_bLovYuX4P0GaEEdA (consulté le 15 avril 2019).
[9] Voir par exemple les recherches de doctorat de Dominique Santana: https://www.c2dh.uni.lu/people/dominique-santana (consulté le 15 avril 2019).

_____________________

Crédits illustration

Berlin, Kameramänner vor dem Schloss (Des cameramen – photographes – devant le château) © 1907 Otto Häckel, Bundesarchiv, Bild 146-1971-003-65, CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.

Citation recommandée

Cauvin, Thomas: Production Audio-Visuelle et Histoire Publique. In: Public History Weekly 7 (2019) 16, DOI: dx.doi.org/10.1515/phw-2019-13822.

Copyright (c) 2019 by De Gruyter Oldenbourg and the author, all rights reserved. This work may be copied and redistributed for non-commercial, educational purposes, if permission is granted by the author and usage right holders. For permission please contact the editor-in-chief (see here). All articles are reliably referenced via a DOI, which includes all comments that are considered an integral part of the publication.

The assessments in this article reflect only the perspective of the author. PHW considers itself as a pluralistic debate journal, contributions to discussions are very welcome. Please note our commentary guidelines (https://public-history-weekly.degruyter.com/contribute/).


Categories: 7 (2019) 16
DOI: dx.doi.org/10.1515/phw-2019-13822

Tags: , , ,

Pin It on Pinterest

undefined
undefined
undefined
undefined
undefined